Croissance et ferroélectricité de BaTiO3 épitaxié sur Si

Les matériaux ferroélectriques présentent une polarisation électrique spontanée et leur fonctionnalité provient de la possibilité de renverser cette polarisation sous l’application d’un champ électrique, ceci de façon réversible. Les applications de ces matériaux sous forme de couches minces sont nombreuses : mémoires non volatiles ultra haute densité, nouveaux transistors à faible tension d’alimentation, composants électro-optiques… Les propriétés diélectriques, piézoélectriques et pyroélectriques de ces matériaux peuvent par ailleurs être exploitées dans de très nombreux domaines : réalisation de composants accordables en fréquence pour les télécommunications, micro ou nano-systèmes électromécaniques (capteurs, actuateurs), dispositifs de la piézotronique (utilisation de la piézoélectricité pour commander/ajuster les propriétés électroniques), etc… Il est important de pouvoir intégrer ces nouvelles fonctionnalités sur le substrat de la microélectronique : le silicium. Cependant, pour des couches ultraminces épitaxiées sur silicium, sans électrode métallique entre la couche et le silicium, l’établissement d’une polarisation électrique, ainsi que son renversement, sont difficiles à obtenir. Ceci est lié au fort champ dépolarisant qui apparaît du fait de l’écrantage incomplet des charges en surface du semiconducteur lorsque la polarisation pointe perpendiculairement à cette surface.

 

Nous avons réalisé la croissance de couches minces de BaTiO3 par épitaxie par jet moléculaire (Molecular Beam Epitaxy). Cette technique permet de contrôler très finement la croissance, pratiquement atome par atome, en envoyant des jets moléculaires vers le substrat sous très faible pression partielle d’oxygène. Afin d’obtenir une très bonne qualité de la structure cristalline, une couche de SrTiO3 a tout d’abord été élaborée sur silicium avant la croissance de BaTiO3. La croissance de SrTiO3 sur silicium est une des expertises phare de l’Equipe « Hétéroépitaxie et Nanostructures » et permet, de façon générale, la reprise d’épitaxie d’oxydes de même structure (perovskite). Nous avons optimisé les divers paramètres de la croissance de BaTiO3 (pression partielle d’oxygène pendant le dépôt, température, conditions de refroidissement après dépôt, etc…).

 

La structure des films a été étudiée par diffraction des rayons X, en particulier au synchrotron de Brookhaven (collaboration avec IBM) et par des techniques avancées de microscopie électronique en transmission (collaboration CEMES – figure ci-dessus). La ferroélectricité a été établie par une technique de champ proche appelée piezoresponse force microscopy (PFM) en collaboration avec l’équipe « Dispositif Electronique » de l’INL et avec l’Equipe de Sergei Kalinin à Oak Ridge National Laboratory. Nous avons montré que les films, d’épaisseur 10-20 nm, dans certaines conditions de dépôt, sont ferroélectriques (figure ci-dessus). Des domaines ferroélectriques sont écrits et renversés de façon réversible sous l’application d’un champ électrique. L’étude de la ferroélectricité de couches ultraminces (quelques monocouches) est en cours.

 

Ce travail ouvre de nombreuses perspectives d’applications. Nous collaborons en particulier avec IBM T.J. Watson Research Center (Yorktown Heights, USA) pour la fourniture de substrats de haute technologie à base de SiGe et pour l’intégration de couches minces ferroélectriques sur semiconducteurs, avec notamment, à terme, la réalisation de dispositifs à effet de champ.

 

Légende:
(a) Image de microscopie électronique en transmission montrant une hétérostructures épitaxiée sur silicium – (b) Images de microscopie à force atomique en mode piezoélectrique (PFM) d’un film de BaTiO3 (20 nm): amplitude et phase – Des domaines ferroélectriques sont écrits et renversés de façon réversible sous l’application d’un champ électrique (± 4V)


Contact:
Catherine DUBOURDIEU – 

 

Référence:
L. Mazet, R. Bachelet, L. Louahadj, D. Albertini, B. Gautier, S. Schamm-Chardon, G. Saint-Girons, C. Dubourdieu, Structural study and ferroelectricity of epitaxial BaTiO3 films on silicon grown by molecular beam epitaxy, Journal of Applied Physics 116, 214102 (2014)

 

Collaborations:
CEMES, CNRS, Toulouse (S. Schamm-Chardon)
Equipe « Dispositifs Electroniques » de l’INL (B. Gautier, D. Albertini)
IBM T.J. Watson Research Center, NY, USA (M.M. Frank, J. Jordan-Sweet, V. Narayanan)
Oak Ridge National Laboratory (S. Yang, S. Kalinin)
Travaux réalisés dans le cadre de la thèse de Lucie MAZET bénéficiant du support du Labex iMUST.

INL CNRS
/* */ //